Ray tracing : c’est quoi et à quoi ça sert ?

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Le ray tracing (lancer de rayons) est une technique de rendu graphique qui simule le comportement physique de la lumière afin de produire des images 3D extrêmement réalistes. Plutôt que de tricher avec des artifices d’illumination, il reproduit fidèlement des phénomènes optiques réels comme les réflexions, les réfractions ou les ombres portées. Longtemps cantonnée au cinéma et à l’animation 3D en raison de sa complexité, cette méthode a fait son apparition récente dans les jeux vidéo grâce aux progrès matériels (GPU) et logiciels qui permettent enfin de l’exploiter en temps.

Qu’est-ce que le ray tracing ?

En synthèse, le ray tracing consiste à simuler le trajet des rayons lumineux dans une scène virtuelle afin de calculer de manière précise la couleur de chaque pixel. Plutôt que de projeter la scène 3D sur l’écran en 2D via la rastérisation classique, on émet des rayons depuis la caméra virtuelle qui vont parcourir la scène et rebondir sur les surfaces rencontrées, jusqu’à atteindre une source lumineuse. À chaque impact, le rayon peut être réfléchi (miroir, métal, etc.), réfracté (verre, eau, etc.) ou absorbé, selon les propriétés du matériau touché. Ces interactions multiples déterminent l’éclairage final du pixel concerné, en respectant les lois physiques de la lumière.

En pratique, cela permet de reproduire des effets optiques complexes impossibles à obtenir avec les méthodes traditionnelles de rendu “triché”. Par exemple, un rayon pourra rebondir sur un mur coloré et teinter de sa couleur un objet voisin (éclairage indirect), ou se réfléchir plusieurs fois entre des surfaces brillantes pour créer un reflet dans un reflet. Le résultat est un niveau de photoréalisme bien supérieur aux techniques classiques, car tous les calculs d’illumination sont unifiés et basés sur la physique réelle.

Ray tracing vs rendu 3D traditionnel (rastérisation)

Pour mieux comprendre, il est utile de comparer le ray tracing avec la rastérisation, la méthode de rendu 3D utilisée historiquement dans les jeux vidéo. La rastérisation convertit la scène 3D en pixels 2D de l’écran en projetant chaque triangle des objets 3D sur un plan, puis en appliquant des textures et des effets prédéfinis (ombres statiques, reflets simulés, etc.). Cette approche, très optimisée, permet un rendu rapide mais utilise de nombreuses astuces pour imiter la réalité (lumières précalculées, ombres « fictives » via des shaders, réflexions approximatives par cubemaps ou autres). À l’inverse, le ray tracing calcule directement l’éclairage par simulation : chaque rayon suit un parcours physique dans la scène, ce qui produit des ombres, reflets et lumières bien plus naturels.

Le tableau ci-dessous résume les principales différences entre ces deux méthodes :

Critère Rendu traditionnel (Rastérisation) Ray tracing (Lancer de rayons)
Approche Projette la scène 3D sur l’écran 2D. Utilise des algorithmes rapides pour dessiner les objets et applique des effets prédéfinis (éclairage artificiel, ombres calculées séparément, etc.). Simule le parcours physique de rayons de lumière dans la scène. Calcule l’illumination de chaque pixel en traçant des rayons qui interagissent avec les objets et les lumières de manière réaliste.
Réalisme visuel Bon rendu général mais approximation : nécessite des trucages (ombres figées, reflets partiels). Certaines situations sont mal rendues (réflections limitées, pas de lumières indirectes dynamiques). Très haut réalisme : reproduit fidèlement reflets, réfractions, ombres douces et éclairage global. Les scènes apparaissent plus naturelles, proches d’un rendu photographique.
Performance Très rapide à calculer, optimisé par le GPU depuis des décennies. Permet des fréquences d’images élevées même sur du matériel modeste, d’où son usage exclusif dans les jeux jusqu’à récemment. Extrêmement gourmand en calculs : chaque rayon et chaque rebond ajoutent du temps de calcul. Longtemps inexploitable en temps réel, nécessite des GPU modernes très puissants (unités dédiées RTX, etc.) pour atteindre 60 FPS.
Utilisation Utilisé partout en temps réel (tous les jeux 3D classiques). Convient aussi aux applications interactives et temps réel nécessitant rapidité (réalité virtuelle, etc.). Utilisé depuis longtemps dans le cinéma et la production d’images de synthèse (rendu pré-calculé) pour des images ultra-réalistes. Désormais partiellement intégré dans les jeux récents grâce aux avancées matérielles (cartes graphiques Nvidia RTX depuis 2018, AMD RDNA 2 depuis 2020).

En résumé, la rastérisation est une méthode rapide et efficace qui a permis les jeux 3D actuels, mais avec des limitations en termes de réalisme. Le ray tracing, lui, vise à simuler exactement la physique de la lumière pour franchir un cap de réalisme visuel, au prix de calculs bien plus intensifs.

À quoi sert le ray tracing ?

L’intérêt du ray tracing est d’améliorer radicalement la qualité visuelle des rendus 3D. En appliquant cette technique, on obtient des éclairages, ombres et reflets beaucoup plus naturels, ce qui bénéficie autant aux jeux vidéo grand public qu’aux applications professionnelles d’infographie. Concrètement, sur un PC gamer, le passage d’un rendu classique au ray tracing peut transformer l’expérience visuelle. Voici quelques apports concrets du ray tracing en temps réel :

  • Reflets réalistes : les surfaces réfléchissantes (miroirs, eau, métal, vitres, etc.) renvoient une image fidèle de la scène. Par exemple, un miroir montre exactement les objets et personnages environnants en temps réel, alors qu’avec un rendu classique ces reflets sont souvent absents ou approximatifs.
  • Ombres naturelles : les ombres portées gagnent en réalisme. Elles deviennent diffuses ou nettes de façon cohérente selon la distance et la taille de la source de lumière (ombres douces plus étendues quand la lumière est éloignée ou large, ombres bien nettes si la lumière est petite et proche). Fini les ombres « dessinées » uniformément : avec le ray tracing, une même scène peut afficher des pénombres progressives et des occultations plus crédibles.
  • Éclairage global dynamique : le ray tracing permet une gestion naturelle de la lumière ambiante. La lumière peut rebondir de surface en surface, éclairant indirectement les zones auparavant dans l’ombre. Par exemple, si un mur est rouge, la lumière réfléchie par ce mur teintera subtilement un sol blanc voisin en rosé – un effet d’illumination indirecte qu’on observe dans la réalité et que le ray tracing reproduit fidèlement.
  • Matériaux transparents et effets optiques : le verre, le cristal ou l’eau apparaissent plus crédibles car la réfraction (déviation des rayons à travers le matériau) est simulée. On peut voir les objets déformés à travers une vitre comme dans la réalité, ou observer des effets de type caustiques (taches de lumière focalisées par une surface courbe en verre ou eau) dans certains cas. Ces détails renforcent le réalisme de la scène.
  • Scènes plus vivantes et immersives : globalement, le ray tracing apporte un rendu plus cohérent entre tous les éléments visuels. Les scènes nocturnes éclairées par des néons, par exemple, gagnent en profondeur avec des lueurs qui se propagent correctement. Les graphismes atteignent un niveau de détail qui améliore l’immersion du joueur, au point que passer de ray tracing “off” à “on” donne l’impression d’un saut de génération graphique.

Le ray tracing dans les jeux vidéo

  • Immersion renforcée : le ray tracing apporte des reflets réalistes, des ombres naturelles et un éclairage plus crédible. Exemple : dans Control, un personnage invisible en rendu classique apparaît dans une vitre grâce aux reflets ray tracing.
  • Avantages gameplay : des reflets précis (flaques d’eau, vitres) peuvent révéler des ennemis hors champ, ajoutant de nouvelles mécaniques visuelles.
  • Jeux compatibles : Cyberpunk 2077, Control, Minecraft RTX, Metro Exodus, Microsoft Flight Simulator, Marvel’s Spider-Man, Fortnite, Portal RTX. Sur consoles : Spider-Man: Miles Morales, Gran Turismo 7, etc.
  • Utilisation partielle : pour préserver les performances, le ray tracing est souvent appliqué seulement à certains éléments (reflets, ombres), le reste restant en rastérisation classique.
  • Impact sur les performances : même avec une carte graphique puissante, une baisse notable des FPS est fréquente. Les studios optent donc pour un usage hybride pour limiter la perte de fluidité.

Ray tracing dans le cinéma, l’animation et l’infographie pro : l’essentiel

  • Technique incontournable : utilisé depuis les années 2000 par des studios comme Pixar (Cars en 2006) pour produire des effets spéciaux et des rendus photoréalistes.
  • Qualité d’image exceptionnelle : reflets précis, éclairage global réaliste, matériaux virtuels indiscernables des vrais objets. Chaque image peut nécessiter plusieurs heures de calcul sur des fermes de rendu.
  • Applications variées : cinéma, publicité, télévision (pour des effets spéciaux et des images ultraréalistes), architecture et design (visualisations 3D réalistes, simulation précise de l’éclairage d’un intérieur), industrie automobile et e-commerce (images de produits réalistes sans shooting photo (configurateurs 3D).
  • Priorité à la qualité : privilégié partout où le réalisme prime sur la rapidité. Le temps réel (jeux, VR) adopte progressivement ces techniques pour se rapprocher du rendu cinéma.

Ray tracing audio

  • Principe : applique le lancer de rayons au son pour simuler sa propagation et ses rebonds sur les surfaces, offrant un son 3D réaliste et immersif.
  • Effets possibles : échos naturels, diffraction (son passant à travers une porte entrouverte), occultation sonore par des obstacles.
  • Exemple concret : Forza Horizon 5 sur Xbox Series X adapte le vrombissement du moteur selon l’environnement (murs, tunnels), renforçant l’immersion.
  • Applications futures : prometteur pour la réalité virtuelle et les jeux immersifs, bien que moins médiatisé que le ray tracing graphique.

Avantages du ray tracing

Adopter le ray tracing, c’est avant tout rechercher un gain de réalisme. Voici un récapitulatif des principaux avantages de cette technologie :

  • Qualité d’image inégalée : éclairages réalistes, matériaux fidèles et effets subtils (reflets, lumières indirectes) pour un rendu visuel très proche de la réalité.
  • Immersion renforcée : ombres dynamiques et reflets précis rendent les environnements plus vivants et immersifs, impactant positivement l’atmosphère et parfois le gameplay.
  • Simplification pour les développeurs (potentielle) : réduit le recours aux astuces d’éclairage (lightmaps, shaders complexes) et facilite la création artistique en automatisant l’illumination.
  • Convergence cinéma/jeu : rapproche les rendus temps réel des rendus cinématographiques, permettant des outils communs et des cinématiques interactives quasi photoréalistes.

Limites et contraintes du ray tracing en temps réel

Malgré ses atouts indéniables, le ray tracing comporte aussi des limitations, surtout dans un contexte temps réel comme le gaming. Il est important d’en être conscient :

  • Performance et matériel requis : très gourmand en calculs, nécessite des GPU modernes avec unités dédiées (Nvidia RTX, AMD RX, Intel Arc). Inaccessible sur anciens GPU ; sur consoles, uniquement PS5 et Xbox Series X|S avec compromis.
  • Impact sur le framerate : baisse importante des FPS, même avec du matériel puissant. Les jeux proposent souvent un choix entre qualité (ray tracing activé, 30 FPS) et performance (désactivé, 60 FPS+).
  • Adoption progressive, résultats variables : peu de jeux l’exploitent à 100%. Les effets (ombres, reflets) sont parfois discrets et l’intérêt dépend du type de jeu et des attentes des joueurs.
  • Complexité de développement : intégration technique lourde nécessitant de nouvelles API et un rendu hybride. Principalement utilisé dans les gros titres, adoption progressive pour des raisons de coût et de performances.

Comment profiter du ray tracing sur son PC ou console ?

Si vous souhaitez tirer parti du ray tracing dans vos jeux ou applications, voici quelques conseils pratiques et points à vérifier :

  • Disposer d’un matériel compatible : nécessite une carte graphique récente avec unités dédiées (Nvidia RTX 4000/RTX 5000, AMD RX 7000/9000, Intel Arc A750/A770).
  • Mettre à jour pilotes et jeux : indispensables pour bénéficier des optimisations régulières et améliorer les performances via DirectX 12 DXR ou Vulkan RTX.
  • Utiliser l’upscaling (DLSS, FSR, XeSS) : augmente les FPS en rendant en plus basse résolution puis en reconstruisant l’image. DLSS est le plus performant, FSR et XeSS plus universels. Consoles utilisent des techniques similaires (checkerboard, PSSR).
  • Ajuster les réglages graphiques : choisir le niveau de ray tracing (bas, moyen, élevé) selon la puissance du GPU. Activer uniquement certains effets (ombres ou reflets) peut préserver un bon compromis performance/qualité.
  • Avoir un bon écran (optionnel) : un écran HDR10 ou 4K améliore la perception des contrastes et des détails, mais augmente la charge GPU, d’où l’intérêt de l’upscaling.

Perspectives d’avenir du ray tracing

Le ray tracing en temps réel va continuer de progresser grâce à des GPU plus puissants et des algorithmes optimisés, permettant un usage plus étendu avec moins d’impact sur les performances. Le path tracing, évolution ultime du lancer de rayons, promet un réalisme quasi parfait mais reste très gourmand, réservé pour l’instant à quelques jeux comme Cyberpunk 2077 (mode Overdrive) ou Portal RTX. À terme, il pourrait remplacer totalement la rastérisation. Au-delà du visuel, des applications comme le ray tracing audio ou la simulation physique élargiront encore son utilisation. À mesure que la technologie se démocratise, elle pourrait devenir un standard pour des expériences visuelles toujours plus immersives.

En conclusion, le ray tracing est une avancée majeure vers un réalisme graphique proche du cinéma. Encore partiel en 2025, il tend à devenir la norme grâce aux progrès matériels et au path tracing. Pour l’instant réservé aux joueurs et professionnels prêts à investir, il devrait se démocratiser et offrir à terme des expériences visuelles immersives accessibles à tous.